Un nouvel arrêt sur l’origine professionnelle ou non de l’inaptitude : nouvelle condamnation d’un employeur au paiement des indemnités spécifiques de rupture consécutiveS à une inaptitude d’origine professionnelle
Un nouvel arrêt récent rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 5 mars 2025(n°23-17. 546) amènera sans nul doute de nouvelles réflexions dans les services ressources humaines lors des prochains licenciements pour inaptitude auxquels ils seront confrontés.
Il s’agissait en l’espèce d’un salarié, chauffeur routier poids lourd, qui avait été victime d’un accident du travail le 3 novembre 2015, accident du travail qui avait été déclaré par l’employeur avec des réserves motivées à la CPAM, et accident qui en définitive n’avait pas été pris en charge au titre de la législation professionnelle.
Dans cette suite logique, les arrêts de travail du salarié ont été requalifiés en arrêt de travail « maladie » et lorsque le salarié s’est retrouvé en situation de reprise, il a passé deux visites médicales auprès des services de la médecine du travail, avec des avis qui n’ont nullement mentionné un lien entre l’inaptitude et l’accident du travail.
L’employeur avait dans ce contexte procédé au licenciement de son salarié pour impossibilité de reclassement et inaptitude au poste du travail, en se plaçant sur la législation de l’inaptitude non-professionnelle, cette dernière ouvrant uniquement droit au paiement de l’indemnité de licenciement,outre les éléments habituels du solde de tout compte.
Le salarié a saisi la juridiction prud’homale, invoquant le fait que son inaptitude était en réalité fondée sur une cause professionnelle, et qu’il était donc en droit de revendiquer le paiement de l’indemnité légale de licenciement doublée, ainsi que de l’indemnité équivalente au préavis.
Il n’est suivi dans son raisonnement par le conseil des prud’hommes et la cour d’appel d’Angers, qui au regard des circonstances de l’espèce, considèrent que l’employeur a, à juste titre, procédé au licenciement sur le fondement d’une origine non professionnelle.
Suite au pourvoi du salarié, ces raisonnements sont censurés par la chambre sociale la cour de cassation.
En effet, la haute juridiction considère que « l’inaptitude du salarié avait pour origine un accident survenu au temps et lieu de travail et que l’employeur avait déclaré cet accident à la CPAM » ; au visa de cette seule circonstance, la Cour de cassation estime que la cour d’appel « aurait dû déduire qu’il(l’employeur) avait connaissance de ce que l’inaptitude était consécutive à un accident du travail »
Jusqu’ici, la chambre sociale de la Cour de cassation admettait l’indépendance des raisonnements, entre les juridictions sociales et prud’homales, entre reconnaissance ou non du caractère professionnel d’un accident, et ses conséquences sur la qualification de l’ inaptitude : un accident du travail reconnu par la CPAM n’induisant pas pour autant la reconnaissance de l’origine professionnelle de l’inaptitude( soc 18 septembre 2024 n°22-24.703) ; l’absence de reconnaissance de l’accident du travail n’excluant pas pour autant l’origine professionnelle de l’inaptitude( soc 18 septembre 2024 n°22-17.737)
Cet arrêt a-t-il vocation à remettre en cause ces précédents arrêts récents, qui confirment une solution jurisprudentielle établie ?
Non, l’arrêt du 5 mars 2025 estampillé D,et rendu en formation restreinte,sans publication, ne semble pas remettre en cause ces solutions jurisprudentielles.
Comme il l’est indiqué sur le site de la Cour de cassation, l’arrêt D pour « diffusé »n’apporte rien à la doctrine de la Cour de cassation et est fréquemment qualifié d’arrêt d’espèce